Juriste, économiste et homme politique italien.

Luigi Luzzatti naît dans une famille juive aisée de Venise, qui vit du commerce et d'une petite fabrique de tissage. Il étudie le droit à Padoue. Sensible au problème des conditions d'existence des classes populaires, il s'intéresse ensuite aux questions économiques. Convaincu de la nécessité d'une solidarité sociale et opposé au socialisme, Luzzatti considère les sociétés de secours mutuels, le crédit populaire et les coopératives comme remèdes au régime de concurrence de la société capitaliste. Il prend pour modèle les banques populaires et les coopératives allemandes inspirées par Herman Schultze-Delitzsch. Alliant la théorie à la pratique, Luzzatti participe à la création de coopératives et d'institutions de prévoyance et de mutualité. Luzzatti est nommé professeur d'économie politique à l'Institut technique de Milan en 1863 puis professeur de droit constitutionnel à l'Université de Padoue en 1866. Il entame une carrière politique en 1869 comme secrétaire général du ministère de l'Agriculture, du Commerce et de l'Industrie. Luzzatti est élu député d'Oderzo en 1870 ; il siège au Parlement jusque 1921. Entre 1891 et 1910, il exerce les fonctions de ministre du Trésor et de ministre de l'Agriculture. Il est président du Conseil en 1910-1911 et devient sénateur en 1921. Luzzatti œuvre au rapprochement de l'Italie et de la France à la fin du XIX^e siècle. En 1899, il est élu membre associé de l'Académie des sciences morales et politiques de Paris et il est nommé grand officier de la Légion d'honneur. Ami du comte de Chambrun, fondateur en 1894 du Musée Social à Paris, il devient président d'honneur de cette institution de recherches sociales. C’est avec des figures du Musée Social et des compatriotes italiens qu’il visite le Familistère le 24 octobre 1898 : Jules Siegfried, Léopold Mabilleau, Léon de Seilhac, Grosseteste-Thierry, Georges Maurin, Olivier Collarini, Federico Gentili di Giuseppe et Emma Gentili di Giuseppe. Au mois de novembre suivant, à l'occasion du 10^e congrès du crédit populaire qui se tient à Angoulême, Luzzatti juge le Familistère : « Il y a une chose que je n'admets pas, qui ne me plaît pas : c'est tout ce qui a l'apparence de caserner la prévoyance. Eh bien, le monastère... le Familistère de Guise, veux-je dire – le mot de monastère m'a échappé – est une caserne admirable, très propre, une prison qui vaut mieux que beaucoup d'habitations libres. Mais ce n'est pas là que l'ouvrier respire la pleine liberté, dont il jouit dans ces petites maisons de l'Alsace qui nous ont fourni le véritable type du logement ouvrier... » (cité dans Revue des études coopératives, 1937, p. 253) Comme le fera Charles Gide après lui, Luzzatti considère par ailleurs que le Familistère est un « miracle social » et non une œuvre économique reproductible (Ibid., p. 254).